Le livre
Suga [Kishio Suga] est un artiste que je place au plus haut. Je le considère à l’égal d’un maître. Je serais satisfait si je parvenais un jour à m’approcher du niveau de ce qu’il a fait dans les années 1970 et 1980. Mais je ne peux pas me contenter de faire des sculptures ou des installations comme lui. Je ne crois pas que la sculpture ou la peinture soit le médium de notre époque. Avec mes livres, je réponds en quelque sorte à l’œuvre de Suga, je m’inscris à la suite de ce type de travail. C’est la raison pour laquelle j’accorde tant d’importance au livre. Le livre est pour moi aujourd’hui le meilleur médium artistique. Je construis mon œuvre avec des livres.
Yûichi Yokoyama, page 29 de Back Cover Numéro spécial Japon
Yûichi Yokoyama est un artiste et dessinateur japonais. En France ce sont les Éditions Matière qui ont fait connaître son travail : de la bande dessinée presque expérimentale, “un art infra-narratif” comme le dit si bien Laurent Bruel dans le sixième numéro de Back Cover.
“Le livre est pour moi aujourd’hui le meilleur médium artistique.” Je m’interroge sur cette phrase. Je me pose plusieurs questions :
- cet intérêt si fort de la part de Yûichi Yokoyama pour le livre est-il lié au fait qu’il s’agit d’un objet fini, clos et maîtrisable ; d’un produit populaire ; d’un support relativement durable ?
- un artiste européen ou vivant en France pourrait-il dire la même chose en 2013 ?
- dans cette déclaration, les intermédiaires que sont l’éditeur et le libraire ont-ils une importance particulière ?
- qu’en est-il du web : les blogs et les carnets d’artistes contemporains ? Et notamment les possibilités de constructions narratives et graphiques à travers ces supports liquides ;
- dans ce même registre du dessin, quelle place a par exemple le blog de Nylso dans sa démarche artistique, par rapport à ses livres, ses fanzines, et ses participations à des revues ?
Les mangas de Yokoyama sont constitués d’épisodes inconsistants et de séquences insignifiantes qui se prolongent sans fin. […] Chaque case est dessinée d’une tracé précis, composée avec une extrême minutie comme dans l’ukiyoé : cinq ou six d’entre elles forment une page respectant les canons de la composition manga ; et deux cent pages ou plus forment un livre… Telle est la forme des œuvres de Yûichi Yokoyama.
Kodama Kanazawa, page 34 de Back Cover Numéro spécial Japon
Il y a relativement peu de ressources en ligne sur Yûichi Yokoyama, voici le billet d’Alexandre Dimos à l’origine de l’article dans Back Cover, et un article de la revue Collections.